Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 17.djvu/260

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— Il a une jolie femme, je l’ai vue au mariage de ta fille… Si Roger… mais Roger n’est plus ici. Hector, mon fils, il s’agit de ton plaisir. Comment ! tu t’en donnes encore. Ah ! tu fais honneur à la Garde impériale ! voilà ce que c’est que d’avoir appartenu à l’intendance, tu as des réserves !… Laisse là cette affaire, mon cher garçon, elle est trop galante pour devenir administrative.

— Non, maréchal, c’est une mauvaise affaire, car il s’agit de la police correctionnelle ; voulez-vous m’y voir ?

— Ah ! diantre, s’écria le maréchal devenant soucieux. Continue.

— Mais vous me voyez dans l’état d’un renard pris au piége… Vous avez toujours été si bon pour moi, que vous daignerez me tirer de la situation honteuse où je suis.

Hulot raconta le plus spirituellement et le plus gaiement possible sa mésaventure.

— Voulez-vous, prince, dit-il en terminant, faire mourir de chagrin mon frère que vous aimez tant, et laisser déshonorer un de vos directeurs, un Conseiller-d’État ? Mon Marneffe est un misérable, nous le mettrons à la retraite dans deux ou trois ans.

— Comme tu parles de deux ou trois ans, mon cher ami !… dit le maréchal.

— Mais, prince, la Garde impériale est immortelle.

— Je suis maintenant le seul maréchal de la première promotion, dit le ministre. Écoute, Hector. Tu ne sais pas à quel point je te suis attaché ! tu vas le voir ! Le jour où je quitterai le ministère, nous le quitterons ensemble. Ah ! tu n’es pas député, mon ami. Beaucoup de gens veulent ta place ; et, sans moi, tu n’y serais plus. Oui, j’ai rompu bien des lances pour te garder… Eh bien ! je t’accorde tes deux requêtes, car il serait par trop dur de te voir assis sur la sellette à ton âge et dans la position que tu occupes. Mais tu fais trop de brèches à ton crédit. Si cette nomination donne lieu à quelque tapage, on nous en voudra. Moi, je m’en moque, mais c’est une épine de plus sous ton pied. À la prochaine session, tu sauteras. Ta succession est présentée comme un appât à cinq ou six personnes influentes, et tu n’as été conservé que par la subtilité de mon raisonnement. J’ai dit que le jour où tu prendrais ta retraite, et que ta place serait donnée, nous aurions cinq mécontents et un heureux ; tandis qu’en te laissant branlant dans le manche pendant deux ou trois ans, nous aurions nos six voix. On s’est mis à rire au conseil, et l’on a trouvé que le vieux de la vieille,