Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 8.djvu/310

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Nous nous servirons de ses Marguerites pour rabaisser les Odes, les Ballades, les Méditations, toute la poésie romantique.

— Ça serait drôle si les sonnets ne valaient rien, dit Vernou. Que pensez-vous de vos sonnets, Lucien ?

— Là, comment les trouvez-vous ? dit un des rédacteurs inconnus.

— Messieurs, ils sont bien, dit Lousteau, parole d’honneur.

— Eh ! bien, j’en suis content, dit Vernou, je les jetterai dans les jambes de ces poètes de sacristie qui me fatiguent.

— Si Dauriat, ce soir, ne prend pas les Marguerites, nous lui flanquerons article sur article contre Nathan.

— Et Nathan, que dira-t-il ? s’écria Lucien.

Les cinq rédacteurs éclatèrent de rire.

— Il sera enchanté, dit Vernou. Vous verrez comment nous arrangerons les choses.

— Ainsi, monsieur est des nôtres ? dit un des deux rédacteurs que Lucien ne connaissait pas.

— Oui, oui, Frédéric, pas de farces. Tu vois, Lucien, dit Étienne au néophyte, comment nous agissons avec toi, tu ne reculeras pas dans l’occasion. Nous aimons tous Nathan, et nous allons l’attaquer. Maintenant partageons-nous l’empire d’Alexandre. Frédéric, veux-tu les Français et l’Odéon ?

— Si ces messieurs y consentent, dit Frédéric.

Tous inclinèrent la tête, mais Lucien vit briller des regards d’envie.

— Je garde l’Opéra, les Italiens et l’Opéra-Comique, dit Vernou.

— Eh ! bien, Hector prendra les théâtres de Vaudeville, dit Lousteau.

— Et moi, je n’ai donc pas de théâtres ? s’écria l’autre rédacteur que ne connaissait pas Lucien.

— Eh ! bien, Hector te laissera les Variétés, et Lucien la Porte-Saint-Martin, dit Étienne. Abandonne-lui la Porte-Saint-Martin, il est fou de Fanny Beaupré, dit-il à Lucien, tu prendras le Cirque-Olympique en échange. Moi, j’aurai Bobino, les Funambules et Madame Saqui. Qu’avons-nous pour le journal de demain ?

— Rien.

— Rien.

— Rien !

— Messieurs, soyez brillants pour mon premier numéro. Le