Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 8.djvu/595

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cions de nous avoir donné les moyens du bonheur, dit madame Ève, et vous nous en trouverez toujours reconnaissants.

— Mon Dieu ! ne me bénissez pas !… dit Petit-Claud, vous me donnez des remords ; mais je crois avoir aujourd’hui tout réparé. Si je suis devenu magistrat, c’est grâce à vous ; et si quelqu’un doit être reconnaissant, c’est moi… Adieu.

En 1829, au mois de mars, le vieux Séchard mourut, laissant environ deux cent mille francs de biens au soleil, qui, réunis à la Verberie, en firent une magnifique propriété très-bien régie par Kolb depuis deux ans.

Avec le temps, l’Alsacien changea d’opinion sur le compte du père Séchard, qui, de son côté, prit l’Alsacien en affection en le trouvant comme lui sans aucune notion des lettres ni de l’écriture, et facile à griser. L’ancien ours apprit à l’ancien cuirassier à gérer le vignoble et à en vendre les produits, il le forma dans la pensée de laisser un homme de tête à ses enfants ; car, dans ses derniers jours, ses craintes furent grandes et puériles sur le sort de ses biens. Il avait pris Courtois le meunier pour son confident.

— Vous verrez, lui disait-il, comme tout ira chez mes enfants, quand je serai dans le trou. Ah ! mon Dieu, leur avenir me fait trembler.

David et sa femme trouvèrent près de cent mille écus en or chez leur père. La voix publique, comme toujours, grossit tellement le trésor du vieux Séchard, qu’on l’évaluait à un million dans tout le département de la Charente. Ève et David eurent à peu près trente mille francs de rente, en joignant à cette succession leur petite fortune ; car ils attendirent quelque temps pour faire l’emploi de leurs fonds, et purent les placer sur l’État à la révolution de juillet.

Après 1830 seulement, le département de la Charente et David Séchard surent à quoi s’en tenir sur la fortune du grand Cointet. Riche de plusieurs millions, nommé député, le grand Cointet est pair de France, et sera, dit-on, ministre du commerce dans la prochaine combinaison. En 1837, il a épousé la fille d’un des hommes d’État les plus influents de la dynastie, mademoiselle Popinot, fille de monsieur Anselme Popinot, député de Paris, maire d’un arrondissement.

La découverte de David Séchard a passé dans la fabrication française comme la nourriture dans un grand corps. Grâce à l’intro-