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LE IOYEULX CURÉ DE MEUDON.

blondelette, grassouillette, la plus mignonne dame qui oncques eust trottiné ioyeulsement ez solives, allaigrement couru ez frises, et gecté les plus gentils crys en treuvant noix, miettes et chaplys de pain en ses pourmenades ; vraye fée, iolie, follette, à resguard clair comme diamant blanc, teste menue, poil lisse, corps lascif, pattes roses, queue de veloux, une souriz bien née, de beau languaige, aymant par nature à vivre couchiée, à ne rien faire, une souriz ioueuse, plus ruzée que n’est un vieulx docteur de Sorbonne cognoissant à fund les Descretales, vifve, blanche de ventre, rayée au dos, petits tettins poinctans comme un soupçon, dents de perle, nature fresche, morceau de roy.

Ceste paincture estoyt si hardie, pour ce que la souriz sembloyt à tous estre le vray pourtraict de madame Diane, lors présente, que les courtizans demourèrent pantois. La royne Catherine soubrioyt, mais le Roy n’avoyt nulle envie de rire. Et bon Rabelais de continuer sans vouloir entendre aux œillades des cardinaulx du Bellay et de Chastillon, en grant paour du bonhomme.

— La iolie souriz, dit-il en allant son train, ne feit pas longues circumbilivaginations, et, dès la prime vesprée où la courattière trotta devant le muzaraigne, elle l’engiponna pour tousiours par ses coquetteries, minauderies, chatonneries, lesbineries, petits reffuz alleschans, resguards coulans, chiabrenas de pucelle qui veult et n’ose, aiguillons d’amourettes, moitiez de caresses, iongleries préparatoires, fiertez de souriz qui sçait son prix, noises pour rire, rire pour noiser, vestilleries, et autres gentillesses, traistrises féminines, gentils deviz engluans, tous pièges dont usent d’abundant les femelles de chaque pays. Alors que, après bien des courbettes, coups de pattes, frosteries de museau, guallantises de muzaraigne amoureux, fronssemens de sourcilz, sospirs, sérénades, gousteries, soupers, disners au tas de bled et autres badineries, le superintendant des grainiers triumpha des scrupules de sa belle maistresse, ils prinrent goust à ceste incestueuse et illicite amour, et la souriz devint, veu qu’elle tenoyt le muzaraigne par sa braguette, la royne de tout, voulut emmoustarder son froment, mangier les sucreries et tout fourraiger. Ce que permit le muzaraigne à l’emperière de son cueur, encores que il refrongnast à ceste trahison envers ses debvoirs de muzaraigne et sermens faits à Gargantua. Brief, poursuyvant son évangelicque emprinse avecques une pertinacité de femme, par une nuictée où ils se gaudissoyent, la souriz eut en remembrance