Page:Balzac - Contes drolatiques.djvu/591

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D’UNG PAOUVRE QUI AVOYT NOM
LE VIEULX-PAR-CHEMINS



Le vieulx chronicqueur qui ha fourny le chanvre pour tisser le présent Conte dict avoir esté du temps où se passa le faict en la cité de Rouen, laquelle l’a consigné en ses layettes. Ez environs de ceste belle ville où demeuroyt lors le duc Richard, souloyt gueuzer ung bon homme ayant nom Tryballot, ains auquel feut baillé le surnom de Vieulx-par-chemins, non pour ce que il estoyt iaune et sec comme velin, ains pour ce que il estoyt tousiours par voyes et routes, monts et vaulx, couchioyt soubz le tect du ciel, et alloyt houzé comme ung paouvre. Ce neantmoins, il estoyt aymé moult en la duchié, où ung chascun se estoyt accoustumé à luy, si bien que, si le mois escheoyt sans que il feust venu tendre son escuelle, on disoyt : « Où est le Vieulx ? » Et on respondoyt : « « Par chemins. »

Ce dict homme avoyt eu pour père ung Tryballot, qui feut, en son vivant, preud’homme, économe et si rengié, que il laissa force biens à ce dict fils. Ains le ieune gars les desamassa bien tost en gaudisseries, veu que il feit au contraire du bonhomme,