Page:Balzac - Les petits bourgeois, tome 2, 1855.djvu/43

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si forts. Gagner la partie à tout prix et l’emporter sur les plus habiles, fût-ce par une friponnerie, est une inspiration de la vanité particulière aux amis du tapis vert. De là vint le terrible coup que la Peyrade devait recevoir. Il connaissait d’ailleurs ses deux associés ; aussi, malgré la perpétuelle contention de ses forces intellectuelles, malgré les soins continuels que voulait son personnage à dix faces, rien ne le fatiguait-il plus que son rôle avec ses deux complices. Dutocq était un grand fourbe, et Cérizet avait joué jadis la comédie ; ils se connaissaient en grimace. Une figure, immobile à la Talleyrand, les eût fait rompre avec le provençal, qui se trouvait dans leurs griffes, et il devait avoir une aisance, une confiance, un jeu franc qui, certes, est le comble de l’art. Faire illusion au parterre est un triomphe de tous les jours, mais tromper mademoiselle Mars, Frédérick-Lemaître, Potier, Talma, Monrose, est le comble de l’art. Cette conférence eut donc pour résultat de donner à la Peyrade, aussi sagace que Cérizet, une peur secrète qui, pendant la dernière période de cette immense partie, lui embrasa le