Page:Balzac Le Père Goriot 1910.djvu/158

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vers lui pour lui adresser sur sa discrétion mille remerciements dans un clignement d’yeux. Le premier acte était fini.

— Vous connaissez assez madame de Nucingen pour lui présenter M. de Rastignac ? dit-elle au marquis d’Ajuda.

— Mais elle sera charmée de voir monsieur, dit le marquis.

Le beau Portugais se leva, prit le bras de l’étudiant, qui en un clin d’œil se trouva auprès de madame de Nucingen.

— Madame la baronne, dit le marquis, j’ai l’honneur de vous présenter le chevalier Eugène de Rastignac, un cousin de la vicomtesse de Beauséant. Vous faites une si vive impression sur lui, que j’ai voulu compléter son bonheur en le rapprochant de son idole.

Ces mots furent dits avec un certain accent de raillerie qui en faisait passer la pensée un peu brutale, mais qui, bien sauvée, ne déplaît jamais à une femme. Madame de Nucingen sourit, et offrit à Eugène la place de son mari, qui venait de sortir.

— Je n’ose pas vous proposer de rester près de moi, monsieur, lui dit-elle. Quand on a le bonheur d’être auprès de madame de Beauséant, on y reste.

— Mais, lui dit à voix basse Eugène, il me semble, madame, que si je veux plaire à ma cousine, je demeurerai près de vous. — Avant l’arrivée de monsieur le marquis, nous parlions de vous et de la distinction de toute votre personne, dit-il à haute voix.

Monsieur d’Ajuda se retira.

— Vraiment, monsieur, dit la baronne, vous allez me