Page:Balzac Le Père Goriot 1910.djvu/256

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Ces mots dits alternativement, et l’hostilité des propos qui commençaient à se tenir sur elle, contraignirent mademoiselle Michonneau à partir, après quelques stipulations faites à voix basse avec l’hôtesse.

— Je vais chez madame Buneaud, dit-elle d’un air menaçant.

Allez où vous voudrez, mademoiselle, dit madame Vauquer, qui vit une cruelle injure dans le choix qu’elle faisait d’une maison avec laquelle elle rivalisait, et qui lui était conséquemment odieuse. Allez chez la Buneaud, vous aurez du vin à faire danser les chèvres, et des plats achetés chez les regrattiers.

Les pensionnaires se mirent sur deux files dans le plus grand silence. Poiret regarda si tendrement mademoiselle Michonneau, il se montra si naïvement indécis, sans savoir s’il devait la suivre ou rester, que les pensionnaires, heureux du départ de mademoiselle Michonneau, se mirent à rire en se regardant.

— Xi, xi, xi, Poiret, lui cria le peintre. Allons, houp-là ! houp !

L’employé au Muséum se mit à chanter comiquement ce début d’une romance connue :

 Partant pour la Syrie,
 Le jeune et beau Dunois…

— Allez donc, vous en mourez d’envie, trahit sua quemque voluptas, dit Bianchon.

— Chacun suit sa particulière, traduction libre de Virgile, dit le répétiteur.

Mademoiselle Michonneau ayant fait le geste de prendre