Page:Banville - La Lanterne magique, 1883.djvu/57

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ment couverts de peintures qui représentent l’histoire de Psyché et les amours d’Aphrodite. Le poète regrette amèrement que cette vision doive si tôt s’évanouir ; mais sa crainte est heureusement déçue, car il entend le messager Herméias crier d’une mélodieuse voix de tonnerre : « Buffet ! Dix minutes d’arrêt ! »

Cependant il n’y a ni ville ni village ; mais dans l’air monte, apportée par le vent, l’odorante fumée d’un sacrifice, et un buffet taillé dans le plus pur marbre pentélique, peint de couleurs vives et orné de plaques de métal, se dresse à l’ombre des oliviers et des caroubiers sombres, reposant sur un pavé d’or et éclairé par mille flambeaux que tiennent des Nymphes et des Satyresses aux pieds de chèvres. Les Déesses et les Dieux viennent s’asseoir aux tables dressées pour leur soif et leur faim, parés de vêtements semblables à ceux qu’ils portaient autrefois, mais coupés dans les plus fines soies et dans les plus belles étoffes de l’Orient, car dussent-ils contrarier Sardou et l’ombre de Duponchel, ils ont rompu avec la laine, aussi bien qu’avec la « sainte mousseline. » La robe d’Aphrodite est faite d’une délicieuse étoffe chinoise, couleur de rose thé, sur laquelle flamboient et miroitent des broderies et de lourdes franges d’argent ; son gorgerin et la large ceinture qui lui prend le ventre sont composés de tous les ors divers et de toutes les éblouissantes gemmes. La cuirasse d’Athènè s’agrafe sur une jupe couleur d’aigue-marine brodée de perles noires, et Ares lui-même porte une armure verte, flexible et docile à ses