Page:Barbey d'Aurevilly-Les diaboliques (Les six premières)-ed Lemerre-1883.djvu/14

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poétique, à lui — que les peintres puissants peuvent tout peindre et que leur peinture est toujours assez morale quand elle est tragique et qu’elle donne l’horreur des choses qu’elle retrace. Il n’y a d’immoral que les Impassibles et les Ricaneurs. Or, l’auteur de ceci, qui croit au Diable et à ses influences dans le monde, n’en rit pas, et il ne les raconte aux âmes pures que pour les en épouvanter.

Quand on aura lu ces Diaboliques, je ne crois pas qu’il y ait personne en disposition de les recommencer en fait, et toute la moralité d’un livre est là…

Cela dit pour l’honneur de la chose, une autre question. Pourquoi l’auteur a-t-il donné à ces petites tragédies de plain-pied ce nom bien sonore — peut-être trop — de Diaboliques ?… Est-ce pour les histoires elles-mêmes qui sont ici ? ou pour les femmes de ces histoires ?…

Ces histoires sont malheureusement vraies. Rien n’en a été inventé. On n’en a pas nommé les personnages : voilà tout ! On les a masqués, et on a démarqué leur linge… « L’alphabet m’appartient », disait Casanova, quand on lui reprochait de ne pas porter son nom. L’alphabet des romanciers, c’est la vie de tous ceux qui eurent des passions et des aventures, et il ne