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nouir dans cette tribune vide et solitaire où elle était restée. Elle en redescendit l’escalier, chancelante et n’ayant plus qu’une pensée : le désir d’aller mourir plus loin ; touchante pudeur de femme malheureuse, dernier soin de la fierté d’une Mendoze qui voulait sauver sa mémoire de l’insulte prodiguée à sa vie.

Quand elle arriva au bénitier où sa main défaillante s’appuya, elle vit, de l’autre côté de cette conque de marbre qui contient l’eau sainte, une femme qui y trempait sa main.

« Ah !!! » — dirent-elles toutes deux en se reconnaissant. Cri réciproque et involontaire auquel le sentiment d’une vieille haine donna une étrange profondeur. L’église retentit de ce double cri, si bref et si sombre. Mais personne, excepté ces deux femmes, ne s’y trouvait alors et ne fut scandalisé d’entendre la voix des passions troubler la paix du sanctuaire.

Elles s’étaient vues déjà. Vellini, pendant la liaison de M. de Marigny et de Mme de Mendoze, avait, curieuse et peut-être jalouse (qui lisait dans cet inscrutable cœur ?), poursuivi d’une recherche acharnée la femme qui lui avait succédé dans le cœur de son amant. Elle s’était multipliée et repliée autour de la comtesse, partout où elle avait pu la rencontrer. Souvent Mme de Mendoze avait involontairement frémi en apercevant dans la foule — soit au