Page:Barbey d’Aurevilly – Du dandysme et de Georges Brummell.djvu/94

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fut ce qu’est le Phénix sur son bûcher et plus beau encore, car il sentait qu’il ne renaîtrait pas de ses cendres. En le voyant, qui aurait dit un homme foudroyé ? Après l’opéra, la voiture qu’il prit fut une chaise de poste. Le 17, il était à Douvres, et le 18 il avait quitté l’Angleterre. Quelques jours après ce départ, on vendit by auction et par ordre du shériff de Middlesex, l’élégant mobilier du Dandy (man of fashion) « parti pour le continent », ainsi que le disait le livre de vente. Les acheteurs furent ce qu’il y avait de plus à la mode à Londres et de plus distingué dans l’aristocratie anglaise. On comptait parmi eux le duc d’York, les lords Yarmouth et Besborough, lady Warburton, sir H. Smyth, sir H. Peyton, sir W. Burgoyne, les colonels Sheddon et Cotton, le général Phipps, etc., etc. Tous voulaient, et payèrent comme des Anglais qui désirent, ces reliques précieuses d’un luxe épuisé, ces objets consacrés par le goût d’un homme, ces frêles choses fungibles, touchées et à moitié usées par Brummell. Ce qui fut payé le plus cher par cette société opulente, chez laquelle le superflu était devenu le nécessaire, fut précisément ce qui avait le moins de valeur en soi, les babioles (the knick-knacks) qui n’existent que par la main qui les a choisies et le caprice qui les a