Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mer, il l’était aussi sur le plancher des vaches. Beaucoup d’expéditions de terre, dont il avait fait partie, l’avaient prouvé, du reste. Seulement, il ne pouvait pas l’être toujours ! La martingale qu’il jouait devait nécessairement avoir un terme, et le danger qu’il courait sous les deux espèces, il devait y succomber à la fin. Or, cet espoir de prendre Des Touches, de tenir la Guêpe, et de pouvoir bien l’écraser sous son pied, avivait et transportait jusqu’au délire ces âmes irritées et créait pour lui un péril si certain et tellement inévitable que, dans l’opinion des hommes de son parti, comme dans celle de ses ennemis, sa prise ou sa mort n’était plus qu’une question de temps, et que, quand, à Touffedelys, on vint nous dire cette terrible nouvelle : « Des Touches est pris ! » nous n’eûmes pas même un étonnement.

Celui qui vint nous la dire, à Touffedelys, cette terrible nouvelle, était un jeune homme de cette ville-ci, dont vous ne savez probablement pas le nom, quoique vous soyez du pays, monsieur de Fierdrap, car il n’était pas gentilhomme. Il s’appelait Juste Le Breton. L’un des préjugés que les Bleus ont le plus odieusement exploités contre nous, c’est que, dans la guerre des Chouans, nous n’étions que des gentilshommes qui remorquaient les paysans