Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/85

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Mais le chevalier Des Touches ! je n’ai jamais revu dans ma vie un tel caractère. À Touffedelys où nous avons tant brodé de mouchoirs avec nos cheveux pour ces messieurs qui nous faisaient la galanterie de nous les demander et qui les emportaient comme des talismans, dans leurs expéditions nocturnes, je ne crois pas qu’il y en ait eu un seul de brodé pour lui. Qu’en pensez-vous, Ursule ?… Toutes les recluses de cette espèce de couvent de guerre l’intéressaient fort peu, quoiqu’elles fussent la plupart fort dignes d’être aimées, même par des héros ! Nous pouvons bien le dire aujourd’hui que nous voilà vieilles. Et d’ailleurs, je ne parle pas de moi, Barbe-Pétronille de Percy, qui n’ai jamais été une femme que sur les fonts de mon baptême, et qui, hors de là, ne fus toute ma vie qu’un assez brave laideron, dont la laideur n’avait pas plus de sexe que la beauté du chevalier Des Touches n’en avait !

Mais je parle pour ces demoiselles de Touffedelys ici présentes, alors dans toute la splendeur de la vie, deux cygnes de blancheur et de grâce, auxquels il fallait mettre un collier différent autour du cou pour les reconnaître ! Je parle pour Hortense de Vély, pour Élisabeth de Maneville, pour Jeanne de Montevreux, pour Yseult d’Orglande, et surtout