Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/218

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unité. Tel est le système à la lueur duquel l’historien va jeter ses regards sur la Chine. Moraliste, il est vrai, dont la morale a cela de supérieur, selon lui, — et d’inférieur, selon nous, — à la morale chinoise, qu’il n’aime point le bambou, et que la Chine a toujours joué de ce gracieux bâton à nœuds avec l’alacrité, la vigueur et la prestesse d’un bâtoniste. Même le suave Confucius ou Khoung-Tseu si cher à M. Pauthier, dont M. Martin emprunte la traduction, se servait du bâton avec avantage, car un jour, trouvant son meilleur ami d’enfance, vieux et assis à l’orientale, sur ses talons, au bord d’un chemin : « Qui, vieux, ne sait pas mourir, ne vaut rien », dit l’aimable sage, et il frappa en perfection le trop vivant bonhomme, tant la Chine, jusque par la main de ses sages, a l’habitude de badiner avec le bambou !

Il y a dans ce badinage, il est vrai, aux yeux du très-sérieux M. Louis-Auguste Martin, quelque chose de très-offensant pour le droit humain, et c’est là le grand reproche qu’il ait à faire à la Chine, mais, enfin, il n’en dit pas moins, fier pour elle comme s’il était lui-même un Chinois : « Ce qui caractérise la civilisation en Chine, c’est la morale ! C’est ce qui la distingue des autres civilisations… Chez aucun autre peuple on ne trouve aussi complètement formulées les éternelles lois du beau, du vrai et du juste, inscrites dans la conscience de l’homme. On les retrouve à chaque page de son histoire, invoquées par ses empereurs, ses ministres, ses philosophes et ses lettrés ! .. »