Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/247

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déclamatoires au marmot de Franklin. M. Flourens cite un mot de cette Mme de Pompadour que Voltaire le familier avait bien raison d’appeler Pompadourette, qui rime à grisette, et qui dit bien le ton de fille de cette femme-là : « Vous êtes un joli garçon, monsieur de Buffon, on ne vous voit jamais ! » II était un joli garçon, comme Corneille.

A mon gré, le Corneille est joli quelquefois.

Mais quelle plus honorable accusation de solitude ! En effet, il ne venait à Paris que dans quelque occasion solennelle, par exemple, pour prononcer un jour, à l’Académie française, le seul discours de réception que la postérité n’ait pas oublié… et il s’en retournait après, reprendre l’immense travail auquel il avait consacré sa vie. Il l’interrompait, cependant, pour recevoir dignement ceux qui venaient visiter cette gloire qui n’était pas sauvage, mais qui sentait qu’elle ne grandirait que dans le labeur et l’isolement des hommes, toujours plus ! Sachant le prix du temps, le prix de tout, planant sur les préoccupations de son âme et les distractions de la vie, ne permettant pas à ces distractions d’emporter jamais sa pensée hors de l’atmosphère où, sans effort, il la maintenait, Buffon, comme Rousseau, ne jouait pas au hibou de Minerve. Ses manières de poser étaient plus aimables.

Il avait beau être un homme de génie, c’était aussi un grand seigneur de sentiment, toujours prêt à l’hospitalité, vous tendant sa belle main du fond de ses manchettes ; qui se levait de son bureau pour vous faire accueil, « mis plutôt comme un maréchal de France que comme un homme de lettres », disait Hume étonné,