Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/410

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il sera taillé et mis sous son arc de lumière. Elle est taillée, elle, mais mince et lumineuse comme la vitre à travers laquelle vous regardez les étagères d’un Muséum, et il faut bien le dire, depuis Fontenelle, — ce léger dans la consistance, comme M. Flourens, — rien de pareil en fait de style scientifique ne s’est vu pour la transparence presque aérienne de la phrase et cette précision, sûre d’elle-même, qui n’a pas besoin d’appuyer.

En effet, il y a, dès les premières pages de ces œuvres complètes, qui renferment non-seulement les découvertes de la science, mais les hommes qui les ont faites, et la biographie après l’histoire, il y a, entre M. Flourens et Fontenelle, un rapport qui saute aux yeux, malgré et à travers toutes les différences de philosophie, de sentiment et de destinée, qui existent entre le Secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences du dix-huitième siècle et le Secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences d’aujourd’hui, et ce rapport, c’est l’incomparable diaphanéité de leur Exposition à tous deux. C’est la sveltesse d’un style que le goût littéraire a dégagé et allégé jusqu’à la légèreté d’un Grammont ou d’un Matta, si de tels hommes avaient pu écrire sur les sciences. C’est cette chose dont on peut se passer aussi en France, mais non sans en souffrir : l’agrément ! l’agrément jusque dans les matières qui comportent le moins d’agrément ! l’agrément, ce superflu si nécessaire à l’esprit français ! Fontenelle et M. Flourens, et tous les deux, autant l’un que l’autre, ont introduit et créé le joli dans la science, sans la dégrader.

Pour la première fois, le Corneille a été joli, sans sottise.