Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/79

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ce que serait M. Saint-René Taillandier. Il est bien probable que nous serions privés de ce grand homme. Aujourd’hui les connaissances que son livre atteste sont comme toujours des importations d’Allemagne sur lesquelles ne rayonne jamais l’aperçu qui les nationaliserait.

La seule chose en propre qui appartienne donc à M. Taillandier, c’est son christianisme libre, lequel ne lui a pas coûté grand’peine, puisqu’il n’est, dans une tête ouverte à toutes les choses vagues, que la notion confuse d’une liberté sans limites. Ce christianisme sans gêne est fort au-dessous d’un protestantisme quelconque, car le Protestantisme a des liens qui l’embrassent et qui le retiennent en des Communions déterminées, et comme le Catholicisme, mais avec moins de bonheur et de facilité que le Catholicisme, il a toujours essayé de défendre son unité, sans cesse menacée et faussée d’ailleurs par son principe même. Non, M. Taillandier n’a pas l’honneur d’être protestant, ou, s’il l’est, car tout le monde qui désobéit peut l’être, c’est un protestant sans doctrine, comme il est un philosophe sans philosophie, comme il est un fantaisiste sans invention, et l’introduction de son livre d’histoire et de philosophie religieuse nous met particulièrement au courant de cette fantaisie sans puissance.

Dans cette introduction, en effet, M. Taillandier, qui a la prétention de remuer ses petites idées générales tout comme un autre, s’efforce de résumer et de bloquer celles qu’il a dispersées dans les articles de son livre, et comme ici nous n’avons pas de romans allemands à exposer ou des cancans d’érudition allemande à faire, nous montrons mieux ce que nous sommes par nous-