Page:Barbey d’Aurevilly - Poussières.djvu/96

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Deviendra mon dernier affront !
Nuit, ciel, jardin, massifs, dehors, tout était sombre,
Et tu regardais dans ce noir,
Mais ton cœur de seize ans avait encor plus d’ombre
Et là, comme dehors, tu ne pouvais rien voir !

Mais moi, moi j’y voyais ! mes yeux perçaient le voile
Qui te cachait ton avenir,
Et je voyais au loin monter l’affreuse étoile
De ce premier amour, qui pour toi doit venir !
Je te disais alors : « Il va bientôt paraître
« Celui-là qui prendra d’autorité vos jours !
« Mais moi qui ne veux pas vous voir subir un maître,
« J’aurai disparu pour toujours ! »

C’est fait… Je suis sorti maintenant de ta vie
Sans t’avoir dit l’adieu qu’on se dit quand on part ;
Silencieusement j’emporte ma folie…
Pour être aimé de toi, j’étais venu trop tard.
Tu ne m’as pas trahi. Je n’ai rien à te dire…
Ce qui fut entre nous, c’est la Fatalité.
D’aucune illusion tu n’eus sur moi l’empire,
Sinon celle de ta fierté !