Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/58

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elle tout à coup au bout d’un instant de silence, si préoccupée de son père qu’elle ne songeait pas même à le nommer ; — seulement quelqu’un est avec lui. Et qui donc ? ajouta-t-elle avec le sentiment de la solitude qui les écrasait ; — puisque vous êtes ici, Néel !

Elle n’avait pas fini de parler que la rude main de Sombreval soulevait la tapisserie de la portière. Mais ce ne fut point lui qui entra le premier, ce fut l’abbé Méautis.

— Ma Calixte, dit Sombreval, — voici monsieur le curé de Néhou que j’ai rencontré dans la cour. Il venait chez toi et je te l’amène. Je ne l’ai pas évité pour cette fois, car, monsieur le curé, je vous ai quelquefois évité quand vous êtes venu voir votre paroissienne au Quesnay.

— Monsieur, tous les habitants de Néhou sont mes paroissiens, répondit l’abbé Méautis, avec la délicatesse de sa charité.

— Mais, — poursuivit Sombreval, — où que nous nous rencontrions maintenant, monsieur le curé, je ne vous éviterai plus !

Tout cela avait été dit pendant que l’abbé Méautis saluait avec sa sérénité ordinaire Néel et Calixte, qui s’étaient levés pour le recevoir. Le visage de Sombreval attirait encore plus l’attention des deux jeunes gens que ses paroles brusquement joyeuses. Ce visage, en effet, ne portait plus l’empreinte de la tristesse qui l’avait offus-