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TOMYRIS,

Charmé de ſes exploits il voit ſans jalouſie
Qu’il mérite lui ſeul l’Empire de l’Aſie ;
Il céde, il reconnoît que les Dieux tout-puiſſans
Le veulent tranſporter des Médes aux Perſans :
Et, content de regner encor dans ſa famille,
Il deſtine à Cyrus & ſon trône, & ſa fille.
Enfin avec les Dieux tout ſemble conſentir.

Tomyris.

Et moi ſeule aujourd’hui je veux le démentir.
Cyrus aſpire en vain au trône d’Ecbatane,
S’il ne doit y monter qu’en épouſant Mandane.
Si je laiſſois unir deux Empires ſi grands,
Bientôt dans mes Voiſins je verrois mes Tyrans.
Je ſuis libre ; & plûtôt que me voir aſſervie,
Je perdrai, s’il le faut, & le Trône, & la vie.

Artabase.

Cyrus, de ſes exploits prêt à borner le cours,
Vous laiſſe votre ſceptre, & reſpecte vos jours.
Il vous offre la paix ; acceptez-la, Madame
N’attirez plus ſur vous & le fer & la flâme.
Pour avoir de mon Roi négligé les avis,
Il vous en a coûté le ſang de votre fils.

Tomyris.

Et contre ce cruel c’eſt-là ce qui m’anime.

Artabase.

Des rigueurs du deſtin lui faites-vous un crime ?
Votre fils n’eſt pas mort de la main de Cyrus.
Le voyant expiré, que pouvoit-il de plus ?
Pour permettre à vos pleurs d’en arroſer la cendre.