Fléchiſſant à nos yeux ſous les loix d’un ſeul homme,
Du nom de Roi des Rois doit honorer Céſar,
Et de ſa propre main s’attacher à ſon char,
Vous vous plaignez du ſort ; hé ! qui le pourroit croire ?
Des mortels peuvent-ils prétendre à plus de gloire ?
Et dans tout l’Univers est-il quelqu’autre rang
Qui puiſſe encor plus haut élever votre ſang ?
Ah ! ceſſe un entretien dont le cours m’importune ;
Tu ſçais trop ſi mon cœur adore la fortune,
Julie, & ſi jamais ſes préſens dangereux
De la triſte Octavie ont arraché des vœux.
Antoine, je le ſçai, regne ſeul dans votre ame :
Mais, Madame, le ſort trahit-il votre flamme ?
Pouvez-vous vous en plaindre, ou plûtôt en ce jour
N’avez-vous pas pour vous la fortune & l’amour ?
Antoine vous adore, il n’eſt rien qu’il n’eſpere
Des bontés de Céſar qui vous tient lieu de pere ;
Et s’il a dérobé ſa tendreſſe à ſes yeux,
C’est pour mieux s’aſſurer un bien ſi précieux.
Je ſçai que pour Céſar Antoine s’intereſſe,
Qu’il ménage pour lui les cœurs avec adreſſe,
Que Céſar lui doit tout, & que ſi les Romains
Dépoſent à ſes pieds l’empire des humains,