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DE CESAR.

Quels injustes soupçons… ah ! Seigneur, pardonnez
Tous les noms odieux que je vous ai donnez.

Brutus.

Au milieu du Senat une vengeance prompte
Dans le sang de César en va laver la honte ;
C’est-là qu’aux yeux de tous je pretens faire voir
le cœur de Brutus a trahi son devoir.
Je reçois tous les jours quelque nouvelle injure,
Jusqu’à mon tribunal on porte le murmure ;
Et si l’aspect du rang où César m’a placé
Impose aux plus hardis un silence glacé,
Empruntant d’autres voix pour me crier vengeance,
Ils sement des écrits dont ma gloire s’offence ;
Ces mots y sont tracez, à mes regards confus,
Tu dors Brutus, tu dors, & n’es pas vrai Brutus.
Ah ! d’un couroux trop lent puisque l’on se défie,
Il est tems que j’éclate, & que je justifie
Et le fameux Romain dont je porte le nom,
Et l’amour de Porcie, & le choix de Caton ;
Non, Rome, moi vivant, tu n’auras point de maître,
Je sçaurai soutenir le sang qui m’a fait naître,
Ou t’en sacrifiant le reste infortuné,
Te le rendre aussi pur que tu me l’as donné.

Porcie.

Ah ! Brutus, dans mon coeur que vous jettez d’allarmes.