Page:Barbusse - Le Feu : journal d’une escouade.djvu/129

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en a trop. Tu vois, c’est toujours « trop » que j’dis, parce que c’est ça.

— Trop ! qu’en sais-tu, vilain ? Ces services, connais-tu qui i’ sont ?

— J’sais pas c’qu’i’ sont, repartit Volpatte, mais j’dis…

— Tu crois qu’c’est pas un fourbi d’faire marcher toutes les affaires des armées ?

— J’m’en fous, mais…

— Mais tu voudrais que ce s’rait toi, pas ? goguenarda le voisin invisible qui, au fond de son capuchon sur lequel se déversaient les réservoirs de l’espace, cachait soit une grande indifférence, soit l’impitoyable désir de faire monter Volpatte.

— J’sais pas y faire, dit simplement celui-ci.

— Y en a qui sav’t pour toi, intervint la voix aiguë de Barque ; j’en ai connu un…

— Moi aussi, j’en ai vu ! hurla désespérément Volpatte dans la tempête. Tiens, pas loin du front, à j’sais pas quoi, où il y a l’hôpital d’évacuation et une sous-intendance, c’est là qu’j’ai rencontré c’t’anguille.

Le vent, qui passait sur nous, demanda en cahotant :

— Qu’est-ce que c’est qu’ça ?

À ce moment, il se produisit une accalmie, et le mauvais temps laissa tant bien que mal parler Volpatte, qui dit :

— I’ m’a servi d’guide dans tout le fouillis du dépôt comme dans une foire, vu qu’il était lui-même une des curiosités de l’endroit. I’ m’menait dans des couloirs, des salles de maisons ou d’baraquements supplémentaires ; i’ m’entr’ouvrait une porte à étiquette ou m’la montrait et i’ m’disait : « Vise ça, et ça donc, vise-le ! » J’ai visité avec lui ; mais lui n’est pas revenu, comme moi, aux tranchées : n’t’en fais pas. I’ n’en r’venait du reste pas non plus, fais t’en pas. C’t’anguille, la première fois que j’l’ai vue, elle marchait tout doucement dans la cour : « C’est l’service courant », qu’i’