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AUGUSTA HOLMÈS ET LA FEMME COMPOSITEUR

leur ignorance, notre génial Berlioz et allant jusqu’à réserver devant l’éblouissante « Carmen » !

À constater ces phénomènes de l’erreur et de l’incompétence humaine, on devient indulgent pour les modernes snobs, donnant tête baissée dans les opinions nouvelles, et croyant affirmer leurs hautes connaissances en accueillant par une moue dédaigneuse la divine simplicité de Mozart, — qui, lui aussi, fut trouvé peu clair par certains de ses contemporains. — Et ma foi, on n’ose plus se montrer ahuri à l’audition de sonorités si confuses et compliquées, qu’il est impossible de distinguer en quel ton, pour quelle mesure et dans quel sens elles furent perpétrées. Après tout, il peut y avoir encore, parmi ceux qui nous semblent peu compréhensibles, un artiste d’avenir ; il serait abominable de le décourager, et qu’importe le présent, nos partialités, nos doutes ou nos convictions ? Seul, le temps rend des jugements stables et, sans se tromper, sépare l’ivraie du bon grain, faisant croître celui-ci et l’érigeant invincible, tandis que celle-là s’étiole et disparaît.

En dépit de livrets absurdes, de mélodies proscrites de nos jours, ou de grands airs bien écrits pour mettre les voix en valeur – de quelle façon bannis chez nos jeunes compositeurs !! — les opéras de Gluck, de Mozart, de Weber, de Haendel, de Rameau, demeurent et demeureront tant qu’il existera un musicien ; il n’y a ni mode, ni cerveaux en mal d’étrangeté, ni esprits arriérés, ni esthétique bornée, capables d’éteindre les flammes du génie, ou d’amoindrir ce qui nous vient des Bach, des Haendel, des Schumann, et de tant de maîtres tenant plus de Dieu que de l’homme.