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ÉVOLUTION DANS L’ART MUSICAL

Combien paraît exacte, en même temps que profonde dans sa modestie, cette phrase de Beethoven « Toute véritable production artistique est indépendante ; elle est plus puissante que l’artiste qui l’a créée, elle retourne à sa source, à la divinité, et n’a d’autre rapport avec l’homme que de témoigner de l’intervention divine en lui. »

On peut ajouter que ces productions sont immortelles, et triomphent de toutes atteintes. Mais justice est également rendue pour les œuvres moins inspirées et châtiées, bientôt disparues, même de nos souvenirs.

C’est ce qu’il advint de la musique d’Augusta Holmès. Holmès, qui très sincèrement s’autorisait de Wagner — symphoniste puissant entre tous — et croyait en suivre l’école, était simplement une mélodiste, à l’imagination féconde et ardente. Son « genre » pouvait encore, il y a vingt ans, convenir au goût du public, mais il ne frayait aucun sentier nouveau, indépendant des routes trop connues dont chaque jour les musiciens raffinés allaient se détourner, avec, de plus en plus, indifférence ou dédain, et, — défaut irrémissible, — il ne se soutenait pas par la pureté de forme ou d’inspiration qui est le côté invulnérable de nos classiques. Aussi dès que l’auteur ne fut plus là pour vivifier ses compositions de sa vie intense, les animer de son âme ardente, de ses habiles doigts de pianiste et de son émouvante voix, elles s’affaissèrent comme des marionnettes que le montreur abandonne, et, maintenant, s’effacent sous le linceul de l’oubli.