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L’APPEL AU SOLDAT

tendait qu’à le compromettre, et Renaudin, prompt à la riposte, révéla que chez la Limousin la police avait trouvé les lettres de Wilson.

Ce même jour, à la Chambre, le reporter vit le gendre de Grévy, raide, avec sa barbe en broussaille et sa figure sombre, marquée par la fatalité, traverser la salle des Pas-Perdus, au milieu d’une hostilité évidente. Un député républicain le félicita sur son article, en traitant Wilson de mauvais camarade :

— J’avais trouvé un gros entrepreneur prêt à mettre des fonds dans mon journal électoral : il désirait la croix. J’en parlai à Wilson qui m’a de grandes obligations. Il nous fit déjeuner chez Grévy. Huit jours plus tard, mon entrepreneur portait sa subvention à la Petite France de Wilson ! Voilà l’homme !

Un informateur parlementaire, bien connu comme la créature de plusieurs ministrables, l’appela « mon cher confrère » et lui dit :

— Vous voyez toujours Boulanger ? Prévenez-le d’éviter les bêtises. On travaille pour lui. Des gens le débarrasseront de l’Élysée.

Déjà allumé par ces encouragements, Renaudin entendit ce même soir, au XIXe Siècle, le patron Portalis commander des notes, une enquête, des articles contre Wilson. Il espéra tout. Il voyait les parlementaires intriguer et la rue s’agiter ; il dit de Boulanger que « c’était couru ». Il promena dans les brasseries l’allégresse d’un soldat pillard qui entend crier « ville prise ». Au sortir d’une réunion où s’était scellée l’alliance « des patriotes et des révolutionnaires » contre Jules Ferry, il se recommandait à Déroulède :

— Promettez-moi de rappeler au Général que je