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« PARAÎTRE OU DISPARAÎTRE, MON GÉNÉRAL ! »

voyant une obstination que la sienne désespère de briser, il lance à toute volée dans cette maison de l’exil son cruel « paraître ou disparaître », puis redoublant, et peut-être heureux de blesser :

— Général, on vous sait le courage militaire, mais vous manquez du courage civil.

Quel tumulte alors et qui là-haut doit frapper au cœur Marguerite de Bonnemains !

Tous se dressent, et le Général :

— En quelque situation que je sois, jamais je ne permettrai qu’on me parle-dans ces termes. Veuillez sortir, monsieur Déroulède.

— Nous sommes tous solidaires, dit Laguerre.

Naquet désapprouve qu’on irrite de querelles privées un débat national. Il parle, il concilie, il obtient d’aller chercher Déroulède, qui fait les cent pas dans le jardin. On se serre la main. Mais comment les yeux pourraient-ils se détourner d’une déchirure trop certaine et que le moindre mouvement agrandira.

Les cinq, rentrés à leur hôtel, se concertent. Ils dîneront ce soir à la table du Général, puisque ce fut accepté avant cette désastreuse conversation, mais ils préparent une lettre. Laisant tient la plume :

« … Impuissants à faire triompher notre pensée auprès de vous, mon Général, nous avons un dernier devoir à remplir : remettre entre vos mains nos démissions du Comité républicain national, dans l’impossibilité où nous sommes de poursuivre désormais l’œuvre de patriotisme et de relèvement national que nous avions entreprise à vos côtés.

« Veuillez agréer, mon Général, avec l’expression de notre respectueuse tristesse, l’assurance de nos