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AUTOUR DE LA GARE DE LYON

taire entendit les ministres, — MM. de Freycinet et Baïhaut, ardemment favorables ; MM. Sarrien et Carnot, se dérobant, — puis MM. Rousseau et Jacquet, les ingénieurs de l’État, délégués à l’isthme, et les représentants de la Compagnie. Elle demanda aux administrateurs leurs livres. Pouvaient-ils communiquer ? Dans cet instant, sur 660 millions encaissés, 640 étaient mangés ! M. Ferdinand de Lesseps prétendit qu’on voulait l’ajourner et qu’il refusait l’ajournement.

Sur cet échec, Bouteiller dans la Vraie République, fit une magnifique campagne, antiparlementaire en somme, car il condamnait l’attitude inerte de la Chambre et lui prédisait le mécontentement du pays. « Que le Grand Français laisse pérorer à son aise cette Commission parlementaire ! Qu’il marche de l’avant ! Sa résolution hardie interloquera ses adversaires, qui étaient prêts à le combattre dans les couloirs de la Chambre, non devant le tribunal de l’opinion publique ! C’étaient des vantardises effrontées. On encaissa 78.750.000 francs en appelant le dernier quart sur les actions. Le 3 août 1886, en émettant à 450 francs des actions 6 p. 100 remboursables a 1.000 francs, on obtint, au lieu de 225 millions qu’on espérait, 200 millions qui coûtèrent 11 ou 12 millions de frais. C’était le cinquième emprunt : il montait à 884 millions les sommes déjà extraites de l’épargne par M. de Lesseps. On affirmait au public que 100 millions suffiraient, mais il fallait encore plus d’un milliard. – Et voilà pourquoi, à l’instant même où Bouteiller revenant de la gare de Lyon s’absorbe dans les nombreuses pensées que ces difficultés lui suggèrent, M. de Lesseps tente