Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/170

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mais de ses défunts et avec des mots qui surent trouver dans ce cœur exalté la source des larmes.

Il repartit, convaincu d’entendre auprès de lui le vol glacial de ses ombres chéries, et pour leur parler, il s’arrêtait parfois sous les bouquets d’aulnes qu’aiment les trépassés. Dans cet extrême état d’émotion, il éprouva le besoin de revoir un ami. Le cher visage du curé de Xaronval lui revint à l’esprit. Celui-là, comme les autres, l’avait abandonné le jour de la procession, mais n’était-ce pas un malentendu ? Il saurait bien le convaincre. Sans hésiter, il fit un détour afin de l’aller voir et de lui demander l’hospitalité pour la nuit. Mais la route était plus longue qu’il n’avait calculé. Quand il arriva à Xaronval, il était recru de fatigue, et déjà les ténèbres tombaient.

Une petite fille vint ouvrir. Il se nomma. En entendant ce nom, Léopold Baillard, l’enfant se glaça d’effroi, comme si elle eût vu Belzébuth déguisé en prêtre, et reculant vers la porte, elle dit que son oncle était absent, mais sans doute allait bientôt rentrer. Puis, rapidement, elle disparut et s’en alla s’asseoir au bord de la route, sur un tas de cailloux.

Comment Léopold interpréta-t-il la terreur