Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/262

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êtres spirituels qui vivent dans les espaces bleuâtres au-dessus de nous, afin qu’un rayon de la paix des anges descende sur leur très humble servante repentante.

Dès le petit jour, sœur Thérèse se leva. Sa figure toute pâle exprimait à la fois la douleur, la résignation et la confiance. L’épicier auquel elles proposèrent les précieux livres de Léopold leur en donna par pitié quelques sous, permit encore à Thérèse d’écrire sur son comptoir une lettre, qu’au sortir de la boutique elle remit à sœur Euphrasie, en disant :

— C’est pour notre père Supérieur.

Sœur Euphrasie comprit tout et que Thérèse ne l’accompagnerait pas à Saxon. Elle dit dans son amertume :

— Il y a des belles qu’on ne voit plus quand les violons sont partis.

Mais Thérèse, en se penchant sur la sœur Euphrasie, murmura :

— Ne m’en voulez pas, ma sœur ; il vaut mieux que je ne rentre pas à Saxon : j’y serais un sujet de honte pour vous tous. Ah ! si quelquefois vous m’avez trouvée orgueilleuse, j’en suis bien punie maintenant, et je ne pense plus qu’a m’aller cacher avec mon fardeau.