Page:Barthélemy-Saint-Hilaire - Métaphysique d’Aristote, tome 1, 1879.djvu/149

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sa propre pensée, il n’a vu qu’elle ; et il ne s’est pas douté que, en philosophie aussi bien qu’en morale et en politique, il composait un roman faux et triste, bien plutôt qu’une véritable doctrine. Bâti par sa puissante imagination, son système ne reposait sur rien ; mais il était fait pour séduire des esprits aussi peu pratiques que le sien et aussi aventureux. Il n’a eu que trop d’imitateurs, de même qu’il n’avait eu que trop de devanciers, plus inconscients et moins persuasifs que lui.

On peut librement critiquer Leibniz sans risquer de porter la moindre atteinte à sa gloire. Il est tellement grand qu’on peut beaucoup lui retrancher, surtout en philosophie, sans le diminuer. Il s’est occupé de Métaphysique, comme il s’occupait de tout, par une curiosité d’esprit insatiable ; mais il n’a pas fait de la philosophie l’objet principal de sa vie, comme Descartes ou Spinoza, comme Aristote ou Platon. Il a été fort mêlé aux affaires de son temps ; mais il semble qu’il s’y est dispersé ; il a peut-être quelque-ibis perdu en régularité ce qu’il gagnait en