Page:Barthélemy-Saint-Hilaire - Métaphysique d’Aristote, tome 1, 1879.djvu/240

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point, et de la vérité, et de ses semblables, et de lui-même ? La morale, quand elle s’efforce de guider les pas chancelants de l’homme, dans sa carrière d’ici-bas, est plus encore que la Métaphysique, précieuseà la philosophie ; elle est la pratique de la vie, tandis que la Métaphysique n’en est que l’explication. Bien des facultés, communes à l’espèce humaine, subsistent dans l’animalité. Sensation, mémoire, intelligence, passions, la bête a tout cela, comme nous l’avons. Mais prétendre qu’elle a aussi le discernement du juste et de l’injuste, la conscience du bien et du mal, lui prêter les luttes qui nous déchirent, mais qui nous ennoblissent, lui prêter les infinies délicatesses du sentiment, les sublimités de la pensée, les triomphes magnanimes de la vertu, l’héroïsme du sacrifice, c’est un outrage gratuit qu’on s’inflige à soi-même. C’est un don plus gratuit encore qu’on fait à l’animal, à qui la nature l’a si évidemment refusé. Le rival qu’on veut créer à l’homme n’est pas un rival ; c’est un esclave, qui a toujours docilement servi son maître, et qui ne secouera jamais