Page:Barthélemy-Saint-Hilaire - Métaphysique d’Aristote, tome 1, 1879.djvu/78

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particulièrement à Protagore qu’Aristote s’attache, et il le prend pour principal représentant du Scepticisme sophistique.

Protagore était de son temps un très célèbre rhéteur ; le Dialogue que Platon lui a consacré suffit à le témoigner. Dans sa lutte contre Socrate, il n’a pas toujours le dessous ; ce qui n’est pas un petit éloge. C’est un adversaire avec lequel il y a profit et plaisir à discuter. Mais, outre son talent et son habileté, Protagore avait eu la bonne fortune d’inventer une de ces formules qui résument à merveille l’état général des esprits, et qui sont accueillies par l’engouement de la mode. Parfois même, ces formules survivent et traversent les siècles. Celle de Protagore, arrivée jusqu’à nous, est bien connue : « L’homme est la mesure de tout. » Lorsqu’elle parut, elle causa, nous pouvons le croire, presque autant d’impression que la théorie de la sensation dans notre XVIIIe siècle. Protagore a été une sorte de Condillac au temps de Périclès. En quelques mots, dont chacun pouvait être juge, il avait exprimé ce que chacun pensait ; il révélait, lui