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que Phœbitius est pauvre, malgré son illustre origine, et que son état ne l’a guère enrichi.

Les bardes insulaires subissaient déjà le sort des bardes gaulois ; quelques-uns d’entre eux prennent encore, il est vrai, à la fin du cinquième siècle, le triple nom de barde, de devin et de druide[1] ; ils gourmandent rois et peuples[2] ; ils dispensent librement le blâme et la louange ; leur personne n’a pas cessé d’être inviolable et respectée ; ils se vantent d’être les descendants directs des anciens bardes de l’île de Bretagne[3] ; cependant le plus grand nombre, sinon tous, n’ont pu se soustraire à l’influence des événements qui entraînent l’Europe entière vers des destinées nouvelles ; ils sont tombés dans un état peut-être moins subalterne que celui des bardes gaulois, mais certainement bien inférieur à la haute position sociale qu’ils occupaient jadis.

Leurs plus anciens monuments poétiques, dont l’authenticité est désormais à l’abri de toute objection, nous signalent cette décadence. Ils nous les montrent pour la plupart sous le patronage des chefs nationaux. Nous les voyons s’asseoir à leur table, coucher dans leur palais, les accompagner à la guerre. Ils forment une portion régulière et constituée de chaque famille noble ; ils y occupent un rang distingué, ils ont des droits et des privilèges, en même temps que des devoirs à remplir[4].

Or cette époque était celle où les Bretons insulaires émigraient en masse en Armorique. Leur premier passage avait eu lieu, sous les ordres du tyran Maxime, vers l’an 383, du plein consentement des habitants de l’île ;

  1. Myvyrian, t. I, p. 26 et 30.
  2. Ibid., p. 27 et 151.
  3. Ibid., p. 23, 27, passim.
  4. Ibid., t. I, p. 4, 19, 35, 57, passim.