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1609. aout.

« Voyla, en somme, tous les interessés et tous leurs interets, quy ne touchent Vostre Altesse qu’en un seul point, quy est celuy des princes de sa maison, quy pourront deschoir sy la souveraineté venoit a estre changée en autre main, a quoy ils ont esté et sont en tout temps sujets, sy vostre estat tomboit en la maison de Bavieres, Medicis, ou autres mediocres princes ; mais ils ne perdroint pas la qualité de princes pour cela : car s’il y eut eu des princes du sang de Bretaigne lors de sa reunion a la couronne, ils n’eussent pas pour cela perdu leur qualité, et nos rois eussent esté obligés de la leur conserver, non seulement par justice, mais par leur propre consideration : je dis davantage, que sy, maintenant que le duché de Cleves va tomber dans une autre race, celle de Nevers subsistoit en France, quy en est descendue, elle conserveroit la dignité de prince, bien que la souveraineté en fut distraitte. Voila l’interest que ces princes de la maison de Lorraine y peuvent avoir ; car pour la succession, ils en sont tous sy eslongnés, a cause des filles quy ont esté mariées a d’autres maisons, qu’ils ne songent pas seulement d’y pouvoir parvenir : la maison de Guyse a plus de cent testes avant que la couronne de Lorraine puisse venir tomber sur la sienne ; celle de Mercure est tombée en quenouille ; et sans cela, beaucoup de princes et princesses de la maison de Medicis leur passeroint devant. Il n’y a que monsieur vostre frere et ses enfans qui patiront de tout cecy, que je plains infiniment ; mais a tout considerer, il ne perd pas tant comme il manque de gaigner. Car cela despend premierement de vostre volonté, secondement de celle de madame vostre fille, en suitte de