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1609. septembre.

de creance, guy estoit mon pouvoir de traitter avesques luy, mais que s’il ne vouloit donner qu’une lettre de creance sans autre chose, qu’il y pouvoit envoyer quelqu’un de sa part pour la porter, et que je me chargerois seulement de traitté, ou response authentique sinnée, avec la lettre de creance pour l’accompagner. Il me dit qu’il craignoit que cette response sinnée de luy ne fut veue, et que cela luy pouvoit importer a la vie mesme. Je luy dis que je n’avois pas moins d’interest de la tenir secrette pour les mesmes raysons, et que je luy respondois que le roy le feroit aussy.

En fin il se resolut de me faire donner une lettre, non de creance, mais de response a ce que j’avois negocié avec luy : ce qu’il fit, et je la rapportay au roy, prenant congé de luy deux jours apres pour l’aller trouver ; lequel fut extreordinairement satisfait du bon succes de toutes les affaires qu’il m’avoit commises, et me fit de tres grandes demonstrations de sa bienveillance.

Septembre. — A peine eus je achevé de luy rendre compte des choses qu’il m’avoit ordonnées, qu’il prit aussy audience de moy pour me parler de sa passion vers madame la Princesse, et de la malheureuse vie qu’il menoit eslongné d’elle : et veritablement c’estoit un amour forcené que le sien, quy ne se pouvoit contenir dans les bornes de la bienseance. Je luy fis a mon tour mes plaintes de luy-mesme, quy avoit fait fouiller et prendre les lettres que mon vallet de chambre, s’en revenant en poste de la court, m’apportoit : ce qu’il me nia fortement ; mais je le sçavois bien, en ayant esté adverty auparavant par la reine, quy dit a ma-