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1612. mars.

promis. Messieurs les connestable et mareschaux descendirent, et vindrent devant l’eschafaud du roy et de la reine, et monsieur le connestable dit a la reine : « Madame, les tenans me demandent le camp que je leur ay cy-devant promis par l’ordre de Vostre Majesté. » La reine luy dit : « Monsieur, donnés leur. » Allors monsieur le connestable dit a Mr  de Pralain : « Prenés le ; le roy et la reine vous l’accordent. » Allors il revint a nous, et le palais fut ouvert de la grande porte, quy estoit vis a vis de celle des Minimes, et nous entrames, precedés de tout nostre esquipage, chariots d’armes, machines, geans[1], et autres choses sy belles, qu’il n’est pas possible de les pouvoir assés bien representer par escrit : seulement diray-je qu’il y avoit, en nostre seule entrée des tenans, pres de cinq cens personnes et deux cens chevaux, tous habillés et caparaçonnés de velours incarnat et de toile d’argent blanche, et nos habillements, en broderie, sy riches qu’il ne se pouvoit davantage : nostre entrée cousta aux cinq tenans cinquante mille escus[2]. Apres nous

    Lesdiguières. M. de Souvré n’était pas encore maréchal en 1612.

  1. On voyait dans le cortège cinq géants, « de la race de ceux qu’Hercule tua en la guerre qu’ils eurent contre les Dieux, en la vallée de Phlegre en Thessalie. »
  2. Les cinq tenants s’intitulèrent chevaliers de la Gloire. M. de Bassompierre fit son entrée parmi eux sous le nom de Lysandre : il avait pour devise une fusée enflammée avec ces mots : Da l’ardore l’ardire (de l’ardeur la hardiesse), qui font allusion à un amour déclaré. — Voir sur cette devise : le VIe Entretien d’Ariste et d’Eugène, par le P. Boullours ; l’Historiette de Porchères l’Augier, dans Tallemant des Réaux ; les lettres de Mme  de Sévigné du 11 novembre et du 2 décembre 1671.