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journal de ma vie.

a ceux que je voulois servir des choses impossibles, et que je prenois sur moy sa sortie, sa conduitte et sa conservation ; que l’on m’avoit donné un passe-port pour un gentilhomme que je despeschois le jour mesme au roy, quy couroit a trois chevaux ; qu’il luy serviroit de vallet jusques a Bayonne, encores que ce gentilhomme deut estre le sien, par les chemins ; qu’il ne partiroit qu’a une heure de nuit en laquelle il falloit qu’il se rendit cheux moy sans qu’il fut apperceu, et qu’il me laissat le soin du reste. Il me dit qu’il se resoudroit a cela et m’en auroit toute sa vie une sensible obligation ; qu’il vouloit parler seulement auparavant a deux de ses amis, et qu’il me prioit que je tinsse toutes choses prestes a l’heure que je luy donnois. Je le quittay sur cela et m’en vins achever ma despesche. Je mis mille pistoles en deux bourses et destinay un des miens nommé le Manny, mon escuyer, pour faire le voyage avec luy, lequel j’instruisis de ce qu’il avoit a faire. Mais comme l’heure fut venue, le comte de Saldaigne saygna du nés et m’envoya dire qu’il ne pouvoit parachever ce que nous avions resolu ensemble, pour des raysons qu’il me diroit des qu’il auroit le bien de me voir. Je ne sçay sy ses amis a quy il parla l’en destournerent, s’il n’eut pas la resolution de l’entreprendre, ou sy l’amour qu’il avoit pour cette fille le fit resoudre a l’espouser.

Je fus voir avant sortir de Saint Geronimo le comte d’Olivares et don Baltasar de Suniga ausquels apres avoir dit le bon acheminement que je voyois en nos affaires, je les priay de moyenner que plusieurs obstacles quy s’y presentoint encores fussent levés, ce qu’ils me promirent.