Page:Bastien - Le rêve de Petit Pierre, paru dans L'oiseau bleu, jan à juil 1923.djvu/22

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portait un vêtement brun d’une coupe impeccable, et son melon de la même nuance, ainsi que ces chaussures fines, dénotaient un véritable souci de l’élégance. Il offrait le type parfait de l’ouvrier Américain qui, trop longtemps privé d’air pur, au travail assidu de l’usine et obligé de vivre dans les logements étroits et sombres, paraît déjà voué à la dyspepsie. Il portait au petit doigt un serpent d’or bruni orné d’un énorme chaton vert. Pierre, qui l’observait, n’en revenait pas ! C’était son oncle, ce beau monsieur-là ! Et comme Freddy était bien habillé ! Lui qui était si fier de ses beaux boutons jaunes et de ses bottes neuves, il sentait qu’il était bien vilain à côté de son cousin, qui portait avec la grâce d’un jeune dandy un complet de plaid écossais, des chaussures fines et des gants de chevreau.

Le petit cœur de Pierre était bien mal à l’aise : il aurait préféré que son beau cousin eût comme lui des habits d’étoffe et qu’il fût moins gênant. Malgré le désir qu’il avait de l’embrasser, Freddy ne s’avançait pas, se contenant de sourire quand leurs regards se rencontraient. Lorsque petit Pierre allait à Saint-Lin, chez son oncle Charles, les cousins Roland