Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 10, 1922.djvu/212

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le clairon de tout à l’heure !… Ce qu’il joue là, c’est pour moi. « Quand je passerai sous vos fenêtres, m’avait-il dit, Mademoiselle… ». (Elle ouvre brusquement la fenêtre, le bruit redouble, elle parle.) Je viens… je viens… je vous accompagne…

DUARD, (tressaillant.)

Ginette ! Ginette !

GINETTE.

À quoi bon attendre des faiblesses ou des larmes !… Tout de suite ! Je vais me mêler à eux… à la foule… Quel plus beau départ pourrais-je souhaiter ?… Me mêler à la poussière de leurs pas rythmés, comme s’ils reformaient leurs rangs, comme ils sont partis autrefois vers la Victoire et vers la Mort !… Ils m’entraîneront dans leur cohue, jusqu’au quai de la gare !… Écoutez le clairon… Que c’est beau ! Comme il parle !… Comme tout revit là-dedans… Adieu, vous autres ! Adieu !…

DUARD.

Ginette ! Ah ! que je vous regrette… que je vous regrette ! Il y aura ici un pauvre homme très malheureux…

GINETTE.

Non… courageux, comme les autres… comme ceux qui n’ont pas payé leur tribut à la grande noblesse ! Je vous en supplie, élevons nos âmes, élevons-les… Nous vivons un moment déchirant, mais sublime…

CÉCILE, (au moment où Ginette a gagné la porte à reculons et où elle va franchir le seuil.)

Va ! va !… Ah ! je comprends maintenant que tu n’étais pas seulement la jeunesse… mais l’idéal ! Je doutais de toi. Maintenant je crois. J’ai