Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 8, 1922.djvu/82

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disais : « Mon petit, mon chéri, mon amour adoré… » Et ces mots, qui étaient dits à un autre que moi, et ces baisers pour un grand, qui étaient les mêmes, avec des pleurs en plus… ah ! ce sont des coups immenses, des bouleversements dans les petites têtes… Le lendemain, je n’ai plus jamais osé t’embrasser de la même façon !

(Un grand silence.)
LIANE.

Mais c’est triste, ce que tu me dis là, Maurice, c’est triste comme tout !… Évidemment, des femmes dans ma situation devraient faire plus attention qu’elles sont mères, seulement c’est incompatible avec l’exigence de la vie qui vous entraîne ! Si j’ai eu peut-être des torts irréfléchis, ils sont lointains maintenant ; je n’ai plus ni les mêmes raisons de me cacher, ni toi les mêmes raisons d’avoir honte !

MAURICE.

Oh ! mais, je n’ai pas honte de toi, maman, ne le crois pas ! C’est des questions personnelles de toi à moi, sans quoi, je ne me pose pas en fils honteux, ou en fils martyr !… Je suis très fier de toi !… Les amants de ma mère ?… Eh bien, quoi… quoi ?… Après tout !… Hein ? Et d’abord je n’y pense plus ! Ta vie avec Rantz m’a mis à l’abri de tous les ennuis que je pourrais éprouver dans cet ordre d’idées. Et même, ça m’est bien égal ! Quand j’en rencontre un, de tes anciens amis, je m’en tire très bien. Tiens, il y a ce Smiloff, qui m’a connu petit, ici, qui a toujours été très gentil avec moi ; ma foi, je suis resté en bonnes relations avec lui. Il n’y a que ce prince d’Erimberg qui m’exaspère. Il a un petit ton odieux, quand il me rencontre ; il me tape sur l’épaule, avec une familiarité un peu méprisante, aux courses ou