Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 3, 1922.djvu/107

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LA BOSSUE.

Aussi vrai que je le dis, ce sont des brigands… Et nous qui avons cru qu’on allait te mettre en liberté. La petite tante disait : « On va la mettre en liberté. » Et moi je répondais : « Mais ma petite tante, croyez-moi, ils l’attraperont… » Et voilà que j’avais raison. J’ai toujours raison, moi !

LA BEAUTÉ.

Moi je connais un avocat, aussi vrai que je le dis, il vous retirerait de l’eau sans vous mouiller… C’était celui-là qu’il fallait prendre.

LA VIEILLE.

C’est la destinée !… Croyez-vous que ce ne soit pas terrible de séparer un vieillard de sa femme et de ses fils… et de le laisser sans personne pour le nettoyer ? Ils m’ont mise ici et mon pauvre vieux est là-bas, et n’a plus personne pour lui nettoyer ses poux.

LA BOSSUE.

C’est toujours comme ça que ça se passe, avec ces maudits juges… « Pourquoi as-tu fait commerce d’eau-de-vie ? » Et avec quoi que j’aurais nourri mon gosse ?

LA MASLOWA.

Et moi qui n’ai rien fait ! Il faut que je sois perdue sans avoir rien fait !…

LA VIEILLE.

Te tourmente pas, ma fille… En Sibérie aussi, on vit… Tu n’y périras pas.