Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 4, 1922.djvu/297

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Didier. Le Didier que vous connaissez n’est pas le vrai ! C’est un faux personnage qu’il s’est composé de toutes pièces pour vous plaire et vous séduire… Derrière cette façade imaginée se cache un tout autre homme que personne ne pourrait soupçonner, et qu’il vient de me révéler en des termes d’une délicatesse infinie… et avec des tremblements dans la voix… Vous m’en voyez bouleversé, bouleversé !…

ROSINE.

Vous dites ?

BOUDIER, (avec volubilité.)

Que, ne pouvant vous conquérir par la séduction, il l’a fait par l’amusement, se collant un masque de loustic boulevardier, qu’il n’ose jeter bas maintenant, et derrière lequel il y a le Didier que j’ai connu, très petite fleur bleue, un garçon tout ce qu’il y a de fin, riche d’âme et de délicatesse, mais, hélas, un riche honteux !… Et celui-là, madame, vous adore avec une passion sans bornes, pleure dans les coins comme un collégien, souffre en silence, et embrasse tous les soirs votre photographie avant de se coucher !…

ROSINE, (reculant sous ce flot de paroles.)

Quoi ? Qu’est-ce que vous me chantez là ?

BOUDIER.

La vérité ! Ce garçon-là s’est fait vulgaire par amour… Vous êtes trompée !… Poliche, le joyeux fêtard ? Allons donc !… un tendre, un mélancolique… parfaitement, madame… un mélancolique langoureux…