Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 8, 1922.djvu/120

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rejoindre, vous regarder jouer aux Champs-Élysées… Je devais déjà vous aimer !… Comme c’est bête, n’est-ce pas ? Vous n’avez pas eu de premier amour, vous ?

MAURICE.

Ah ! si je vous disais lesquels ?… J’aime mieux ne pas y repenser !

NELLIE, (simplement.)

Pas ça… Je veux dire une toute première affection… comme quand on est enfant, vous savez !… Vous n’avez jamais écrit de vers pour personne ?

MAURICE.

Volontairement, jamais !… Un joli premier amour, ce doit être en effet agréable à se rappeler. Affaire de veine… hélas !

NELLIE.

J’aurai cette supériorité sur vous.

MAURICE.

C’est justement pour que vous puissiez, plus tard, vous reporter sans déplaisir à ce souvenir insignifiant qu’il ne faut pas l’entacher le moins du monde. C’est pour ça qu’il importe que ce début d’aventure n’ait aucune suite. Mon Dieu, que je m’exprime bêtement, grossièrement, Mademoiselle ! Je n’ai pas l’habitude de parler à une jeune fille du monde… du vrai monde !

NELLIE, (avec une moue sceptique.)

Oh ! du monde !… Celui qui nous entoure et qui nous a faits.

MAURICE, (continuant avec véhémence.)

Et pourtant je sais très bien ce que je veux dire.