Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 8, 1922.djvu/392

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m’apparaît aujourd’hui tout à coup la chose la plus simple et la plus normale du monde !

HENRIETTE.

Mais ton bonheur… ce n’est pas une petite question… ton bonheur que tu voulais défendre ?

HONORINE.

Le bonheur ! qu’est-ce que c’est que ça ? Ah ! s’il fallait, à mon âge, courir après cet oiseau-là… Mais on n’en finirait plus !… Mon bonheur, vous l’avez estimé à sa juste valeur en réclamant âprement de moi ce qui t’effraie, maintenant que j’y consens !… Mon bonheur ! Ah ! qu’il soit dans tes yeux. Oui, c’est vrai, j’aurais peut-être voulu… souhaité… un peu plus de joie pour moi dans mes vieux jours… mais bast ! c’était trop demander, ça… et la vie n’est pas à la hauteur de nos rêves.

HENRIETTE.

Tu vois. Là, dans le coin des yeux…

HONORINE, (l’étreignant en larmes.)

Embrasse-moi… Je te dis de m’embrasser de toutes tes forces ! Serre, serre fort… (Elle l’étreint, puis elle se dégage.) Ah ! que c’est bon, ça !

HENRIETTE.

Je t’aime, je t’aime à la folie, maman !… Je m’en suis aperçue encore tout à l’heure quand je t’écoutais parler de toi… de ton passé… de ta beauté d’autrefois… J’oubliais que nous étions brouillées… Comment ai-je pu dire d’aussi vilaines paroles ? Je les croyais.

HONORINE.

Parbleu ! On croit toujours toucher le fond de son cœur ! Mais un cœur c’est bien plus profond