Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 9, 1922.djvu/196

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BOUGUET.

On trouvera dans mon testament… une donation qui doit assurer ton avenir.

EDWIGE, (rejetant sa chaise.)

Ah ! par exemple ! Jamais ! jamais ! Si vous quittiez la vie… si…

BOUGUET, (l’interrompt avec une autorité formidable et sans réplique.)

Tu accepterais. C’est indispensable. Ne me contrarie pas, ne tourmente pas ma conscience inutilement… à cette heure où il faut qu’elle se nourrisse d’espérance !

EDWIGE, (subitement, se met à rire pour le rassurer.)

Et puis, et puis… je promets tout ce que vous voudrez… Suis-je bête de discuter ! Quelle folie ! Quelle folie de penser que vous soyez même en danger ! Vous vivrez, vous éblouirez encore le monde de vos découvertes, de vos travaux, de votre grandeur, pendant que moi je serai dans quelque coin de ville, perdue, oubliée de vous à tout jamais… Moi, c’est fini, mais vous, vous ! Allons donc !…

BOUGUET.

Qui sait !… Voici peut-être l’assignation !… Comme ce serait étrange, alors, que je meure pour avoir une fois, une seule, accepté les préjugés, les conventions, et la plus bête de toutes… celle du sang qui répare la vie… tandis que Blondel a été emporté par l’instinct de la possession, le premier en date, celui qui vient du début du monde !… C’est drôle, tout de même ! Deux savants qui soufflent leurs chandelles et s’entre-tuent, comme des ignares au nom des vieilles règles qu’ils sont chargés de transformer !… Comique, vraiment !… Mon vieux maître Tardieu aurait souri, satisfait de