Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/132

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par la raison et par l’intérêt aux hommes éclairés, qu’il vaut mieux être esclaves que libres, ce seroit le comble du délire. Ignorance profonde, crainte vive et continuelle, habitude invétérée de tout souffrir dans le peuple ; assujettissement perpétuel de tous les mandataires du maître, nécessités à l’obéissance purement passive et à l’exécution de tout commandement quelconque : tels sont les ressorts du despotisme arbitraire. Telles sont ses relations politiques avec le reste des hommes opprimés par son pouvoir ; relations de violences, d’usurpations, de guerre continuelle. Heureusement pour l’humanité, quoique cet état de guerre entre tous les hommes soit le caractere essentiel du despotisme arbitraire, les hostilités n’y sont pas générales et continuelles, sans quoi tout périroit en très peu de générations dans les empires asservis à ce monstrueux régime. Le peuple (et sous ce nom sont compris dans les despotismes arbitraires, les propriétaires fonciers, les cultivateurs, les agents de la classe stérile) le peuple est considéré comme le troupeau du maître. De cette idée fondamentale résulte une seconde opinion universelle, qui balance un peu dans les effets celle du pouvoir arbitraire de donner et de faire exécuter les ordres les plus absurdes et les plus pernicieux, sans trouver jamais de résistance ni même de retard à leur exécution. Le maître est censé ne vouloir pas qu’on détruise son troupeau, à moins qu’il n’en donne l’ordre exprès et positif ; il est censé ne vouloir pas que les bergers en usent pour eux-mêmes à son préjudice : cette idée retient souvent la main des subalternes, elle sert de frein à leur cupidité, elle force quelquefois l’avidité même la plus stimulante des usurpateurs à des ménagements. Une partie du peuple jouit plus ou moins de ses propriétés et de ses libertés pendant ces especes de treves ou de suspensions d’hostilités, qui résultent d’un défaut actuel de volontés destructives dans le maître ou dans ses mandataires, et c’est là ce qui retarde un peu la désolation totale des pays infectés de cette contagion. Mais outre que l’état habituel est toujours un état général de guerre et d’oppression, les hostilités universelles ou particulieres du despote