qu’il put se flatter, un temps, d’y avoir réussi. Mais devant tout à son respect de la discipline, à la fermeté de son caractère, à la constance de sa conduite, il ne pouvait avoir de sympathie ni d’indulgence pour un être nerveux, inégal, toujours porté aux extrêmes, passionné de fantaisie et d’indépendance. — Et réciproquement.
Après quelques mois où il avait été vraisemblablement
plus ou moins abandonné aux soins de Mariette, « la servante
au grand cœur » dont Mme Aupick n’était sans doute
plus jalouse[1], — Charles fut mis au collège. À Lyon
d’abord, puis à Paris, suivant les changements de garnison
de M. Aupick. Il semble n’y avoir guère mordu aux mathématiques,
par contre il brilla dans le grec et le latin. Avec
plusieurs de ses condisciples, Émile Deschanel notamment,
il échangeait des bouts-rimés. Mais il n’était pas heureux,
bien qu’il eût le « goût très vif de la vie et du plaisir ». Il
souffrait de la rudesse des contacts qui lui étaient imposés.
« Coups, batailles avec les professeurs et les camarades,
lourdes mélancolies, a-t-il noté, sentiment de solitude dès
mon enfance, malgré la famille et au milieu des camarades
surtout, — sentiment de destinée éternellement solitaire. »
Les quelques lettres qu’on a de lui pour cette période
témoignent d’une précoce délicatesse. Il a rencontré une
femme « qui a les mains blanches », et le voilà ravi en
extase. Il assiste à un superbe coucher de soleil. « Mais à qui
le dire ? » soupire-t-il. Quant à l’effet qu’il produisait sur
son entourage, il était fort divers. Un de ses condisciples
nous a vanté ses étonnantes finesse et distinction, un autre
a tiré du mélange de cynisme et de mysticisme constaté
dans ses propos, et du fait qu’il récitait avec enthousiasme
- ↑ Les Fleurs du Mal, cx