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XXV
ÉTUDE BIOGRAPHIQUE.

n’était là qu’une plaquette, et plus tard il la désavouera, voudra même l’effacer de son œuvre. Pourtant elle apportait assez de points de vue nouveaux pour le signaler à l’attention du monde artistique. En 1846, il publie avec des essais humoristiques : Conseils aux jeunes littérateurs et Choix de maximes consolantes sur l’Amour, son Salon de 1846, où il faut voir un des traités les plus substantiels où aient jamais été agitées les hautes questions d’esthétique, et, sur la couverture de cet ouvrage, il annonce comme devant paraître prochainement Les Lesbiennes, premier titre des Fleurs du Mal[1]. Cette même année, il donne encore Le Jeune Enchanteur, et, la suivante, La Fanfarlo, les deux seules nouvelles qu’il ait jamais achevées. Œuvres de jeunesse sans doute, où l’influence de Chateaubriand et de Balzac s’avère trop sensible, qui néanmoins semblaient pleines de promesses. Mais la Révolution éclate, dont la grande voix retentit au cœur de tous les meurtris et irrésignés. Il entend son appel, oublieux des épithètes injurieuses dont il avait lui-même peu de temps auparavant stigmatisé le parti républicain, où il voyait un ennemi-né du grand art. Les journées de février le trouvent dans la rue, on l’y rencontre les mains noires de poudre et criant : « Il faut aller fusiller le général Aupick ! » Avec Champfleury et Toubin, il fonde un journal : Le Salut Public, qui ne dure que quarante-huit heures, faute de fonds. En 1849, on le retrouve à Dijon. Pourquoi ? Qu’y fait-il ? On ne sait, c’est là une page mystérieuse de sa vie. Au cours des deux ou trois années qui suivent, on le voit encore donner deci delà des signes d’intérêt au mouvement démocratique, écrire une préface aux œuvres de Pierre Dupont, figurer parmi les rédacteurs de La République du Peuple… Mais, vers 1852, le voici qui

  1. Voir un peu plus loin notre Histoire des Fleurs du Mal.